dimanche 21 juillet 2013

Jours -7, -6 à Montréal

Je magasine les emplois. Lettre de motivation pour l'offre "surveillant de salle à manger d'école" sur laquelle je vais appliquer aussitôt que j'ai fait (encore) une autre version de mon cv.

Bonjour Mme [...],

      Il me fait plaisir d'appliquer pour le poste de surveillant de salle à manger d'école. Je suis un jeune adulte déménagé à Rimouski il y a deux ans et j'ai toutes les qualifications requises pour surveiller dans la salle à manger : j'aime travailler avec ce groupe d'âge, j'ai une attitude ouverte et positive, j'apprends vite et m'adapte facilement. J'ai également de l'expérience : j'ai été moniteur de camp d'été (clientèle 12-17 ans), bénévole pour les jeux spéciaux du Québec, professeur au niveau Cégep et concierge dans une école secondaire à Montréal.
      Surqualifié? À cette étape de ma vie je recherche un emploi stable avant tout. Si j'ai les compétences pour enseigner au Conservatoire de musique, au Cégep ou même à l'UQAR, les postes, eux, se font rares et instables ; bien honnêtement, c'est trop peu pour arriver à rembourser mes dettes d'études. Un emploi à la [...] représente pour moi un investissement, une pause essentielle avant de me projeter dans l'avenir.
      En espérant vous rencontrer pour une entrevue en personne, je vous prie d'agréer, madame, l'expression de mes sentiments les meilleurs,

Rémy

C'est vraiment difficile sur l'estime de passer une heure -- oui, ça prend une heure écrire deux paragraphes comme ça -- de passer une heure à s'agenouiller de toutes les façons possibles par écrit pour un poste qui ne m'intéresse pas du tout. Le bout "Surqualifié?", je pense qu'il est essentiel puisque le Conservatoire et TELUS ont refusé ma candidature pour leurs jobs de merde à cause de ça. J'ai quand même peur d'avoir l'air de me prendre pour un autre, j'ai pesé et retourné dans ma tête chaque mot de la lettre, j'ai même consulté un dictionnaire des synonymes.
Appliquer sur une job de merde et se faire dire qu'on n'est pas assez de la marde pour toucher au salaire offert, y'a une expression en anglais pour ça : add insult to injury. J'avoue que ça fait chier si t'as un secondaire 5 de te faire piquer ta job par un gars avec une maîtrise qui écrit bien et qui est juste trop fucking paumé pour attendre la job "dans son domaine". Bin fuck you, personnage fictif, je vais user de toutes les tactiques possibles pour te voler ton esti de 20$/h à rien colisser avec tous les avantages sociaux. Pendant ce temps, c'est d'autres personnes avec des maîtrises qui travailleront sous pression, dans un environnement stressant et plein de responsabilités pour des organismes qui arrivent à peine à payer 12$/h (sans compter les heures converties en bénévolat parce que, tsé, on est smatte le monde qui font ces jobs là).

Les autres emplois sur lesquels je vais postuler c'est "intervenant en service social", "adjoint à la direction" et "agent au marketing". Miam miam, les jobs plattes. Le fric, le fric, pendant ce temps là le temps passe. #yolo mon cul.

Alors c'est comme ça que je passerais mon dimanche de congé -- à écrire des lettres de motivation, faire des versions adaptées de mon cv et rêver à des mois et des mois de job de merde à engranger du pécule pour me sortir du trou tout en espérant ne pas perdre le feu -- si j'étais en congé aujourd'hui. Mais non, je travaille ce soir à faire des sondages dans la rue.

Ensuite il ne reste plus que 5 jours à mon contrat à Montréal. Le temps a passé très vite et très lentement à la fois, c'est bien comme ça. Je ne suis pas sorti une fois à Montréal. Je prolongerai mon séjour pendant une semaine ou deux, je continue à gagner de l'argent au compte-gouttes.

EDIT : Quelques heures après avoir complété ce billet, de nouvelles lettres de motivations se sont ajoutées.

Bonjour à vous à [...],

      Je ne proposerais pas mes services de marketing partout, mais avec vous ça m'intéresse. Je travaille avec coeur et rigueur, avec enthousiasme et persévérance. Je crois que vous connaissez mon implication intègre d'artiste multidisciplinaire, gestionnaire de [...] et organisateur communautaire [...].

      Vous ne saviez peut-être pas que j'ai été coordonnateur marketing chez [...]. J'y faisais de la recherche de clients potentiels par internet, du travail administratif et des appels de sollicitation. J'ai également été adjoint à la direction au [...]. Mon travail était principalement administratif : suivi des abonnements personnels et institutionnels, tenue du grand livre, soutien à la prise de décisions budgétaires, écriture de chèques, etc. Je travaille également à contrat pour la vérification des chiffres de l'organisme [...] lors de demandes de subventions.

       Je vais vous le dire bien honnêtement, la meilleure personne pour le poste chez vous, c'est [...]. Je lui ai parlé de votre offre d'emploi et si elle vous écrit, je vous souhaite de l'embaucher. Je suis par contre un bon deuxième : j'ai une bonne approche avec les gens d'affaire, j'ai toutes sortes d'idées originales et je n'ai pas peur des chiffres. J'ai de l'expérience dans la recherche de commandites, notamment pour [...] et [...].

       Je suis surtout un "fan" de [...]. Je considère que vous êtes un acteur essentiel à Rimouski, à mi-chemin entre la morosité du [...] et le côté souvent un peu pointu de [...] (que j'aime beaucoup aussi). Je pense qu'il est vital qu'une ville à forte proportion étudiante mais également retraitée ait accès à [...]. Je suis d'avis que l'offre de [...] est indispensable car elle contribue à mettre de l'avant la diversité et présente des réalités qui nous sortent de l'univers souvent un peu uniforme de Rimouski. Je n'ai pas de misère à "vendre" [...] car j'y crois sincèrement.

       Alors voilà pour ma candidature honnête. En espérant avoir un retour de votre part, bonne fin d'été!

Rémy

Une autre :

Bonjour,

      Je vous envoie mon CV à tout hasard car je n'ai pas de formation accréditée en [...] ou en [...]. Je suis toutefois une personne très impliquée à Rimouski, notamment pour [...]. À titre d'organisateur de [...], j'ai eu l'occasion de parler à toutes sortes de personnes de toutes sortes de problématiques, d'être une ressource et un rassembleur pour des gens qui n'ont que très rarement l'occasion de s'exprimer librement. J'ai beaucoup de bénévolat sur ma feuille de route : ménage d'appartements pour personnes démunies à Québec, serveur dans des soupes populaires, travail auprès des personnes handicapées mentales, etc. Je suis une bonne oreille, compatissant et rationnel à la fois. Surtout, j'aime aider et accompagner des personnes qui traversent des moments plus difficiles.

      Alors voilà, j'ai vu votre offre d'emploi "[...]" et c'est ce qui m'a donné envie de communiquer avec vous. N'hésitez pas à communiquer avec moi pour voir si je pourrais vous être utile, peut-être même que mon expérience peut compenser ma formation toute autre. Mon CV en pièce jointe.

      Bon été!

Rémy


Encore, celle là c'est pour une offre via une agence de placement à qui j'écris :

Bonjour [...],

      Serait-il possible d'avoir plus d'information sur le poste d'[...]? Le poste m'intéresse, je voudrais par contre m'assurer que la compagnie, l'organisme ou l'institution pour qui je travaillerais cadre avec mes valeurs. Je voudrait également vérifier si leurs locaux sont situés à une distance raisonnable de chez moi.

       Je suis un candidat sérieux, j'ai été [...] pendant 2 ans (tenue du grand livre, aide aux décisions budgétaires, suivi des abonnées personnels et institutionnels, gestion du courrier, écriture de chèques, etc.). J'ai également de l'expérience comme [...], un bacc. en [...] et des études avancées en musique qui démontrent ma capacité de réflexion. Je suis parfaitement bilingue : j'ai fait la majeure partie de mes études universitaires en anglais en plus de travailler à quelques reprises en traduction anglais vers français. Quand [merde je viens de voir que j'ai fait une faute : Quant] à mes aptitudes en communications, je crois que de très bon commentaires à mon égard ont été transmis à votre collègue [...] pour un petit contrat de sondage en face-à-face que j'ai fait pour [...] au [...].

       Au plaisir d'en savoir plus sur l'entreprise et sa direction, mon CV en pièce jointe.

      Bon été!

 Rémy

Ça y est. Se chercher une job de marde est une job de marde, pas payée. Je frôle la dépression. Temps passé à faire ça en ce beau dimanche ensoleillé : 5 heures.

vendredi 19 juillet 2013

Jours -22, -21, -20, -19, -18, -17, -16, -15, -14, -13, -12, -11, -10, -9, -8 à Montréal

La lune de miel est terminée. Je n'ai pas tenu le rythme du blog quotidien. Je n'ai pas non plus lâché l'idée complètement.
J'avais bien lu "Le pianiste temporaire est rémunéré selon un taux de [x] $ / h pour toutes les tâches reliées à l’accompagnement. [On] reconnaît une heure (1) de préparation pour chaque heure accompagnée." Mais je n'avais pas bien lu la phrase qui suivait : "Le taux de [x] $ / h inclut donc l’heure de préparation et l’heure d’accompagnement." Je me retrouve avec un chèque de paye deux fois plus petit que celui auquel je m'attendais... chaque heure payée en accompagnement inclut donc une heure (non rémunérée) de préparation. Câlisse.
C'est des problèmes d'adulte et c'est ce qui me dérange le plus. L'argent, who cares about le fuckin argent? Les gens qui s'en font pour ça sont les cupides et les dans marde. Les cupides on les connaît, les dans marde sont ceux et celles qui en arrachent pour joindre les deux bouts, qui hésitent avant de s'acheter un café de peur que ça ne passe pas sur la carte de crédit -- le compte chèque est vide de toute façon. Les dans marde sont ceux et celles qui font vivre les banques, qui se plaignent tout le temps et qui devraient se fermer la gueule, ils avaient juste à y penser avant. Les dans marde peinent à se tenir debout devant la pression de travailler à salaire fixe (et dérisoire) pour une grosse boîte 37,5 h par semaine. Je ne sais pas combien te temps je pourrai tenir.
Ce matin j'ai pris le métro pour la première fois pour aller au travail. Il y avait un orage matinal, je ne me rappelle pas avoir vu ça avant. Dans le métro, j'ai fait une liste des comptes à payer avec la paye que je pensais avoir : 700$ à la Banque, 200$ à la Caisse, 10$ pour manger. Oublie ça.
Je ne sais pas combien de temps je me tiendrai debout et me répéterai que je suis fort je suis fort je suis fort je suis fort. C'est tentant de basculer, de maudire toutes les paires de roues de bicyk à 5000 piasses qu'on se paye autour de moi avec l'argent du 60 h semaine pour la grosse compagnie, de rager sur les osti de restaurants toujours pleins de monde qui se peuvent pu de se les payer ici et ailleurs. Je marche lentement sous le soleil cuisant (car l'orage s'est rétracté pour un temps), je m'achète des souliers à 5$ et des bas à 2$ parce que les bottines que j'avais ç'a pas d'allure et les bas d'hiver de Noël 2011 fittent pu. Je marche lentement et je me traîne les pieds dans leurs nouveaux souliers usagés. Colisse que je suis tanné.
Les problèmes d'adultes sont ceux qui font renoncer aux passions au profit du quotidien. "Quand j'étais jeune, je voulais être musicien", de dire l'employé de la grosse tour à bureau. Moi quand j'étais jeune, je voulais simplement ne jamais être un adulte.
Je boirais, je mangerais, je fumerais, je me détruirais de luxes inutiles.
J'ai eu un pas pire horaire cette semaine : lundi 9 à 12 à l'École + 17 à 21 souper chez ma mère, mardi 9 à 12 à l'École + 16:30 à 20:30 sondages dans la rue, mercredi 9 à 12 à l'École + 19:30 à 22:30 pratique, jeudi 9 à 12 à l'École + 17 à 21 sondages dans la rue, vendredi 9 à 12 à l'École + 18:15 à 22:00 sondages dans la rue. Je travaille samedi et dimanche soir pour les sondages avant d'entamer ma dernière semaine à l'École lundi prochain. Je travaillais également en fin de semaine passée, un p'tit aller-retour à Rimouski pour honorer un contrat. J'espère prendre le temps d'en reparler car c'était vraiment une belle expérience, mêlée à des pensées qui vont vraiment dans tous les sens.
Je travaille fort, je travaille pas assez, je travaille pour pas assez, je travaille pas assez d'avance pour me trouver du travail et engraisser ma Banque.
Osti je suis tanné, je sens littéralement ma passion, ma fougue et mon ardeur naturelles laisser place à l'amertume, le vague à l'âme et la déprime. J'ai appliqué encore sur 3 jobs cette semaine, 2 à Montréal, 1 à Québec. Whatever.
Rimouski ne me manque pas pour une seconde. Le monde 100% "de souche", franco, hétéro, classe-moyenne-qui-essaye-d'avoir-l'air-classe-sup., uniforme et où l'ambition est dévaluée constamment peut bien rester où il est à ne pas changer.
Montréal me répugne tout autant qu'avant. Le monde du trafic, des carriéristes, de l'arnaque-même-pas-subtile, de la solitude version alone together, du racisme à demi-mot, des grandes activités grand public où les banlieusards viennent se saucer, du fric extrême (extrême pauvre et extrême riche), etc.
Je ne sais pas où est ma place. Québec me semble tellement un compromis que ça ne me tente même plus d'y retourner.
Je pense souvent aller passer quelques mois à Berlin. Puis je me demande comment je ferais pour nourrir mes pauvres banquiers québecois. Il faut se botter le cul pour partir, et j'ai tellement botté le cul de tout le monde que je n'ai plus la force ("...ou la faiblesse", disait Francine Raymond) de m'occuper du mien.
Segue : Je ne suis toujours pas sorti dans un bar de Montréal depuis mon arrivée. Pas de temps, pas d'argent.
J'ai souvent dit que "pas d'argent" n'était pas une raison pour ne pas sortir, je reviens sur ces paroles. Pas d'argent, c'est une très bonne raison d'être foutument mal à l'aise devant les possessions et les dépenses des autres. Sortir dans un bar, chauffer sa piscine creusée au propane, voilà de bons exemples de choses qui me rendent inconfortable. Je me dis, pour un quart du prix je n'ai plus de soucis pour deux semaines, pour un quart du prix j'ai un morceau de drum, une réparation d'ampli, un reméchage d'archet, un vélo qui tient la route (tant qu'à l'utiliser tous les jours été comme hiver...).
Je suis fatigué. 

lundi 8 juillet 2013

Jour -23 à Montréal

#firstworldproblems

Je ressens ce que je pourrais ressentir si cette vie était la mienne.
- Comment ça s'est passé à la job aujourd'hui?
- Ah bin, je me suis réveillé, j'ai snoozé trois fois mes deux alarmes pour un total de six snoozes. Ensuite je me suis fait un café à la cafetière italienne avec des toasts dorées. J'ai écouté la Première chaine de Radio-Canada Est du Québec en mangeant, buvant, facebook, gmail, sites de rencontre (why not?). Ensuite je me suis rendu au travail à vélo en 28 min 34 sec*. La prof était absente, j'ai donc assisté au cours d'une autre en plus d'accompagner 40 minutes de "conditionnement physique" donné par encore une autre. J'ai été prendre un café en ville, j'ai lu un peu, j'ai été au parc et à la crème molle avec cousine et bébé. Je suis rentré pretty absentmindedly à vélo en longeant le Canal Lachine. Là je blogue.
- Ok. Comme d'habitude, genre.
- Bin pas tant, en vrai plusieurs éléments de ma journée étaient uniques, nouveaux, inattendus. Mais j'ai une impression de routine, ou plus exactement, je ressens ce que je ressentirais si c'était là ma routine.

*Je fais des statistiques de façon désintéressée, juste parce que j'en n'ai pas peur. D'autres tenteraient d'améliorer leur performance, pas moi, je me contente d'observer, c'est très zen. Donc j'ai été au travail à vélo 3 fois, ce qui me permet de tracer une courbe de tendance avec un polynôme de deuxième degré. Voici comment, et je fais l'exercice sachant que j'arriverai à quelque chose d'absurde, ça m'intéresse.

Données :
4 juillet, 34:15 (temps t = 0)
5 juillet, 30:19 (temps t = 1)
8 juillet, 28:34 (temps t = 2)

On veut une équation de la forme y = at^2 + bt + c
Euh, j'ai déjà enseigné ça et je ne me rappelle plus du tout comment on fait. L'internet ne m'aide pas plus ce soir.

On va donc y aller au plus simple, on prend la première et la dernière donnée, on trace une ligne entre les deux et ça va être bin en masse. La ligne a une pente de 34:15-28:34 / 2-0 = ah là faut soustraire des secondes. Fuck it, je suis blasé, j'ai peur de tout, je pourrais passer ma vie à faire exactement ce que j'ai fait aujourd'hui et ne plus jamais me poser de questions.

#çacommencecommeça

dimanche 7 juillet 2013

Jour -24 à Montréal


samedi 6 juillet 2013

Jour -25 à Montréal

J'ai passé plus de temps en nature au cours des 5 derniers jours à Montréal qu'au cours des 5 derniers mois à Rimouski.


vendredi 5 juillet 2013

Jour -26 à Montréal

Première semaine de travail complétée. J'allais dire "déjà complétée" mais non, j'ai vraiment senti chaque minute passer. Tous les jours, j'ose un peu plus dans mes choix musicaux, j'hésite moins à me fier à mon instinct, j'improvise, ça fonctionne. J'ai assisté à une classe avancée, holy shit, magnifique.

Ensuite j'ai été lire sur le bord du canal : The Wild Boys, de William S. Burroughs -- trouvé hier en anglais dans une librairie usagés sur St-Viateur, après être allé faire réparer le vélo avec lequel je me rends maintenant au travail depuis hier et avant d'être allé boire un latté fuckin excellent au Café Olympico -- et Lettres à un jeune poète (Briefe an einen jungen Dichter), de Rainer Maria Rilke en édition bilingue allemand/français acheté à Rimouski il y a plusieurs mois -- sélection kétaine assumée.

Le salon ici, à 17 h 49.


Ce soir un show à aller voir, des amis de la Gaspésie. Demain un show à aller voir, des improvisateurs de haut calibre de Montréal. Après-demain un show à aller voir, des amis improvisateurs de haut calibre de Montréal. Après-après-demain, début de la deuxième semaine.

Il faut que je dorme il faut que je dorme il faut que je dorme.

Je me suis décroché sans effort un deuxième emploi à temps partiel.
Je n'ai toujours pas mis les pieds dans le Village des boules roses.

jeudi 4 juillet 2013

Jour -27 à Montréal

Mon histoire d'amour avec la canicule
Aujourd'hui racontée en trente alexandrins


Comme tu m'as manqué, chaud le soleil très chaud
Toi, cyclope malin aux regards plus qu'ardents
Ton édredon de chair, ce ciel de gris d'opale
N'a de bleu que l'idée que l'on se fait de lui

Ton insolence règne à l'abri des hauts murs
Si ailleurs on vénère le fruit de tes rayons
Ici on te déteste et envie ton pouvoir
Dont la trace se sent sur les corps entassés

Sous le plomb de ton oeil  j'observe, intransigeant
Montréal suffoque, ça transpire et ça meurt
La peau bien visqueuse, des cernes sous les yeux
La laideur des villes s'expose sans censure

Sur les peaux basanées comme sur les très blanches
De grosses goûtes roulent et glissent nonchalantes
Disparaissent ensuite, promptement absorbées
Par les tissus frêles des vêtements d'été

Je t'apprécie vraiment, sacrée boule de feu
Qui ralentit le pas creux de la populace
Qui fait sacrer les vielles et brailler les enfants
Qui ne tolère pas, ne discrimine pas

Ah! La canicule, sanction montréalaise
Pour moi une vengeance, une attaque légère
Un p'tit coup de marteau sur la tête des mules
Un croc-en-jambe lent dans les pattes urbaines

Métropolitaine, la foule ploie sous toi
Grand astre justicier, je te fais donc l'offrande
Du sourire amusé qui parfois m'apparait
Au visage : je ris, sales Montréalais!


mercredi 3 juillet 2013

Jour -28 à Montréal

Marché St-Denis pas mal, bu du bon café.
Acheté du beurre de peanut à l'épicerie, yes!
Je reviens d'une pratique vraiment géniale
Avec du monde dédiés et uniques.
Fuckin belle journée.

mardi 2 juillet 2013

Jour -29 à Montréal

J'ai eu ça dans la tête une bonne partie de la journée (l'image n'a pas rapport) :



It's your first day at work, it's your first day at work
And you feel so nervous, you feel just like a jerk

Première journée à l'École, j'étais un peu nerveux, fébrile, mais surtout calme, confiant, pour moi c'était la suite du plan de départ ni plus ni moins. Réveil-matin à 6:30 (ouch!), café dans la cafetière italienne (une autre première), toast dorées, métro. J'avais mon sac à partitions, mes souliers "chic", la chemise, le cardigan.

And your boss is being nice to you but that's just for today,
Tomorrow he'll be mean to you so you better listenen up and
Do what you're supposed to do, do what you're supposed to do.

Ma collègue principale est vraiment sympathique, elle sait me rendre à l'aise. J'ai un piano peu satisfaisant (électronique) qui m'enlève par contre beaucoup de pression. Même un vraiment bon pianiste sonnerait poche là dessus, alors je peux passer pour ce pianiste, peut-être. Ma collègue la prof est assez claire au niveau musical, pas trop d'incertitudes pour moi, et elle me laisse parfois une latitude que j'apprécie beaucoup. Elle aime quand mes choix sont particulièrement bons et le dit devant tout le monde. Mon égo s'ajuste.

Mais c'était la première journée, on m'écoutait à peine, les priorités sont ailleurs pour l'instant. Bin correct! Au fait, pourquoi avoir peur de se faire corriger quand c'est justement ce qu'on vient chercher? C'est donc une très bonne first day at work, ma boss est nice, mais je sens que tomorrow viendra, je m'y prépare.

Les jeunes sont impressionnantes, ça fait la split sur un moyen temps. Elles ont déjà commencé à goûter aux corrections de Mme la professeur. Ouf, y'en a qui chiaient dans leur tutu (imaginaire... Yo, y'en n'a pas de tutus) je le voyais dans leur face, c'est pas Mme la prof bébé de l'école primaire avec ses autocollants de princesse qui varient en grosseur selon la qualité du travail. Il y a bien quelques commentaires positifs, savamment distribués, mais en gros tu peux juste être contente de t'en sortir indemne si tu n'as pas semblé donner ton maximum.

Différence d'attitude notable entre les différents jeunes et une forte corrélation entre cette différence et leurs milieux d'appartenance. J'en reparlerai.

Montréal, ville de mon agenda, je fais le plein : aller voir un concert ce soir, pratique de chant demain, souper jeudi, rendez-vous galant vendredi (ça c'est juste un souhait jusqu'à date par contre), aller voir un concert samedi, etc. J'ai d'affaire à me trouver du temps pour la sieste.

Pluie fine sur Montréal, il y a deux filles en bas qui jouent au badminton dans un stationnement.

lundi 1 juillet 2013

Jour -30 à Montréal

À chaque Montréalais son parcours quotidien, à chaque Montréalaise son sentier urbain. On dirait quasiment un slogan de la STM. J'ai connu la ligne verte, entre 2003 et 2011 : Frontenac - McGill - Frontenac - Beaudry - Frontenac - Pie IX - Frontenac - McGill - Beaudry - Frontenac - Charlevoix (!) - Papineau - Frontenac. Maintenant, juillet 2013, j'apprends la ligne orange. Aujourd'hui : Square-Victoria - Laurier - Square-Victoria. Des paysages nouveaux, une ville qu'on ressent de façon complètement différente. Je suis dans le Montréal de quelqu'un d'autre.

J'ai rencontré aujourd'hui le staff que je côtoierai tout l'été, de près ou de loin. Assis dans la salle, devant une présentation qui se voulait sympathique mais qui, on le sentait, avait été organisée par des gens qui ont l'habitude du formel, je regardais tout le monde et essayais de les placer dans la rue à Rimouski.
Tout ce beau monde, ces ex-danseuses-étoiles, ces grands pédagogues, ces adjointes, ces habitués de la place, tout ce beau monde se ferait regarder de travers.
Une telle avait une grande robe qui aurait été trop extravagante (selon l'équation très belle = dérangeante), l'autre avait une coupe de cheveux un peu fripée, l'autre parlait anglais (quoi!).
Pourtant je suis certain que les gens de Rimouski, un à un, une à une, un coup placés en minorité à Montréal, seraient super ouverts. Enfin, c'est toujours facile de parler dans l'absolu.


Je suis dans un appart vraiment cool, étrangement chaleureux malgré ses planchers et plafonds et béton nu. Il y a un petit balcon où j'ai passé pas mal de temps déjà, quelques plantes, ma chambre est super.

Demain matin j'accompagne une première classe à l'École.

* photo : vision du balcon